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Le journal de Newton

Il y a un mur de différence entre lire une phrase dans un essai et la vivre. (A. Nothomb, Stupeur et tremblements)


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Les mondes possibles
--> Une théorie de David Lewis

Je n'arrive pas vraiment à me motiver à travailler en ce samedi matin. J'ai revu un article de Gottlob Frege, mais avec peine. Le reste du temps, je l'ai passé à ne rien faire (ah si, j'ai déjà écrit un autre article ce matin...) Je me suis donc dit que j'allais vous parler un peu d'un sujet de l'examen que j'aurai le 23 septembre prochain, histoire d'allier travail et plaisir. Le sujet large est une théorie de David Lewis (le philosophe), touchant à la réalité d'autres mondes possibles. Le sujet plus particulier est la compréhension logique des phrases du type "Si Oswald n'avait pas tiré sur Kennedy, Kennedy ne serait pas mort". On appelle ce genre de phrase les conditionnelles contrefactuelles.

D'abord, une petite explication sur ce terme un peu barbare de "conditionnelle contrefectuelle". On distingue en effet deux types de conditionnels, à savoir le conditionnel indicatif et le conditionnel subjonctif ou contrefectuel. Le premier concerne notre monde présent (le monde dit "actuel"), tandis que le second, celui qui nous intéresse, concerne d'autres possibilités que celles qui sont effectivement le cas dans notre monde. Nous allons donc parler de ce conditionnel contrefactuel, mais encore avant cela, je dois vous expliquer brièvement la théorie de D. Lewis à propos des mondes possibles, une théorie un peu folle, mais qui permet la résolution de nombreux problèmes logiques et philosophiques.

Lewis propose de dire qu'il n'y a pas que les choses que nous connaissons dans notre monde qui existent, qu'il n'y a donc pas que notre monde qui existe réellement. Il y a d'autres mondes! Et ils sont tout aussi réels que le nôtre!!! Eh oui, c'est la fin de l'illusion de notre croyance d'être le seul univers qui existe! Parce qu'il ne s'agit pas de l'existence de martien ou de je ne sais quel extra-terrestre, il s'agit de mondes totalement séparés du nôtre, auxquels nous n'avons pas accès: on ne peut pas les observer au moyen d'un téléscope (et pas à cause de leur éloignement). Lewis dit en effet qu'il n'y a pas de lien causal entre deux mondes possibles. Les lois de la physique et de l'astronomie étant des liens causaux, nous devons considérer par conséquent que ces mondes sont totalement séparés du nôtre. Qu'y a-t-il alors de commun entre eux? Eh bien, Lewis fait part d'une intuition qu'il ne peut pas prouver (parce qu'il ne peut pas le contrôler dans ces mondes inaccessibles), à savoir que les lois de la logique (et de la physique aussi) sont communes à tous les mondes possibles. Ceci peut être mis en rapport avec la citation que j'avais hier dans mon bloc "citation", une citation de Wittgenstein qui dit que Dieu n'aurait pas pu créer un monde illogique. (En passant, si vous cliquez sur la rubrique "citation", vous tomberez sur une page où je mets les citations qui sont passées sur mon site.) Maintenant, nous devons nous demander ce qui fait la particularité de notre monde, par rapport aux autres mondes. En effet, il y a quand même le fait qu'il s'agit du monde "réel", selon l'opinion commune. Lewis répond à cela que rien ne fait l'originalité de notre monde: tous les mondes possibles existent pareillement! Ce qui fait que notre monde peut être dit "actuel", c'est que j'y suis. Il propose donc une théorie de l'indexicalité pour montrer la différence des différents mondes.

Par rapport aux conditionnels, cette théorie de l'indexicalité apporte une simplification incroyable. En effet, il n'y a plus besoin de différencier les deux types de conditionnels, puisque notre monde est simplement un parmi d'autres. Pour chaque monde, Lewis pose encore des sphères d'accessibilité (et c'est par ce moyen que nous pourrons atteindre intellectuellement d'autres mondes). Il faudra donc considérer ces sphères d'accessibilité pour pouvoir évaluer les propositions conditionnelles. Là, ça devient "un peu" technique... Lewis pose alors un nouveau signe qui ressemble à []--> (un carré suivi d'une flèche) pour parler de ce conditionnel. Le truc encore à souligner, c'est qu'avec la traduction logique de "s'il pleut, alors la route est mouillée", la phrase est toujours vraie quand il ne pleut pas. Lewis distingue donc quatre sortes de vérité et fausseté, à savoir la vérité vide, la vérité non-vide, la fausseté opposément vraie et la fausseté opposément fausse. Je traduis un peu... La vérité vide concerne les propositions comme "s'il pleut, alors la route est mouillée" et qu'il est absolument impossible qu'il pleuve. La vérité non-vide concerne le même type de propositions, mais s'il est possible qu'il pleuve et que chaque fois qu'il pleut, la route est mouillée. La fausseté opposément vraie concerne toujours le même type de phrases, mais lorsque il existe des cas où il pleut et la route n'est pas mouillée. Enfin, la fausseté opposément fausse est le cas lorsque, dans un monde, chaque fois qu'il pleut la route n'est pas mouillée. Est-ce à peu près clair?

Vous êtes sûrement en train de vous dire que tout ça est bien joli, mais à quoi ça sert??? Eh bien, ça sert à pouvoir dire ce qui rend un phrase conditionnelle vraie, ou ce qui la rend fausse. Et cette attribution de vérité ou de fausseté n'est de loin pas évidente à comprendre. Lewis permet de clarifier un peu la situation, et c'est tout bénéfice pour la philosophie... (Au fait, la philo n'est-elle pas cette branche où on peut encore se permettre de penser à des choses qui ne changent rien à notre monde, mais seulement à notre manière de le voir? à méditer...)

Article de newton, à 11:37 dans la rubrique "Philosophie".
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Les réactions à cet article :

 
jeanjacques
jeanjacques
11-09-04
à 12:00

Merci de prendre du temps à ellaborer tes textes. Ce qui me semble étonnant, je ne connaissais bien sur pas Lewis, c'est que ces idées rejoignent celles qui sont apparues depuis une vingtaine d'années  sur la cosmogonie moderne. L'existence d'univers bulles complétement indépendants les uns des autres. Le naif que je suis se plait à voir des coïncidences entre la philosphie, les sciences physiques, et la littérature comme par exemple dans la science-fiction, qui est malheureusement considérée souvent comme un sous-genre peu intéressant. Voilà donc mon commentaire en passant.

Quand à ta remarque finale, toujours ignare que je suis, je me permet quand même de te signaler que la philosophie a bien souvent changer le monde, peut être à son corps défendant. Les hommes utilisent les idées pour leur propres buts et tout régime politique ne manque pas d'asseoir son pouvoir, surtout s'il n'est guère démocratique, sur de belles théories.

Mais peut être que je me trompe même si je l'écris...

Salutations

;-)

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newton
newton
11-09-04
à 13:10

Re:

Merci pour ton commentaire! Ce serait effectivement intéressant de comparer la théorie de Lewis avec les cosmogonies modernes... J'en ai lu d'ailleurs un petit quelque chose dans le Ciel et Espace de ce mois... Je vais essayer de m'y replonger un peu pour voir si un rapprochement serait possible! Merci pour cette ouverture!

Quant à ta remarque sur les pouvoirs plus ou moins autoritaires, je crois que tu as raison. Cependant, je dirais plutôt que les pouvoirs ont utilisé des théories philosophiques pour faire avaler certaines choses aux gens, mais la philosophie est une théorie d'abord, et non pas une pratique (dans notre conception occidentale du moins, ce n'est pas la même chose, je pense, en Extrême-Orient où il me semble que la philosophie est d'abord une vie...)

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